mercredi 15 septembre 2010

Bilmbogirl (Jodi, toute la nuit - tome 2 : la carcasse et les os)

Jodi, toute la nuit
Voir aussi:
http://jodi-book.over-blog.com/

et
http://jodi.over-blog.net/
Tome 2 :
La carcasse et les os
Didier de Lannoy


Bimbogirl

Dans une économie de marché, on n'aime pas (personne), on baise (tout le monde, par tous les trous et dans toutes les positions) !

Lower East Side. Intersection de Ludlow et de Rivington. De jeunes voyous, en meute, agressifs, impulsifs, compulsifs, armés de couteaux à cran d'arrêt, en font jouer la lame. Casquettes retournées. Cols relevés jusqu'au menton. Combat-boots. Jeans délavés. Cheveux décolorés. Grandes oreilles décollées. Pupilles dilatées. Anneaux sur les paupières et la langue. Visages peinturlurés à la crème de camouflage. Couilles brûlées.
Armés de couteaux à cran d'arrêt et de cutters. De sprays au poivre, d’un molosse au poil ras, de scalpels et de couteaux à huîtres. De ciseaux, de rasoirs, d'antennes de voiture, de masses, de clefs anglaises, de tournevis, de bouts de tuyau, de coups de poing en métal, de lacets de cuir, de rubans adhésifs et de menottes métalliques. De barres de fer, de pieds-de-biche, de clubs de golf, de sticks de hockey et de battes de base-ball. Et de nunchakus.
- Mais pas d’flingues, ch'amais ! Ch'est trop nerveux ch'es machins-là, ch'a part tout ch'eul, ch'a crache tout de ch'uite. On n'a même plus le temps de ch'ouir, quoi !
Ecouteurs sur les oreilles. Cellulaires au ceinturon. Bagues aux doigts. Bracelets de force cloutés. Canettes de bière. Trash music. Kystes au cerveau. Cannabis dans les urines. Adossés aux portières et aux garde-boue d'une voiture planquée le long du trottoir. Une voiture piaffante. Suralimentée. Gonflée aux amphétamines. Aux pare-chocs surdimensionnés.Une grosse cylindrée, car-jackée huit jours plus tôt dans la banlieue d'Albany. Fils du tableau de bord encore apparents. Maquillée sommairement à l'aide de pièces récupérées sur des épaves. Bricolée. Trafiquée. Transformée en stock-car. Equipée d'un scanner permettant de capter les communications de la police et des chauffeurs de taxi. Dotée de pneus surdimensionnés. Munie d'une fausse plaque d'immatriculation. Copiée. Ou d'une vraie plaque. Volée. Ronflement haletant d'un moteur puissant qui tourne au ralenti. Une meute de jeunes voyous. Mentons et fronts proéminents. Testicules hypertrophiées. A l'affût ! Pratiquant le taxi sauvage, la virée en bande à la recherche d'une proie ou d'un mauvais coup, le casse à la voiture-bélier, le dépeçage de bagnoles, l'agression de promeneurs solitaires, l'arrachage de sacs, le kidnapping et le viol collectif des pétasses et des enfants de choeur. Cherchant, repérant et débusquant le médecin de garde, le bouseux de Wichita Falls ou le banlieusard de Long Beach en virée à Big Apple, le livreur de pizzas ou de derniers sacrements, le queutard en fin de nuit, la vieille cocotte poudrée, les jeunes tendrons sans expérience, les animaux malades et sans défense, le véhicule à éperonner. Une meute considérant avec intérêt et perplexité un type, un civil nommé Kevin Jones, qui sort son chat de compagnie, achète une scie à métaux, un hachoir, un rouleau de scotch et un paquet de gros élastiques de bureau dans un magasin de nuit, récupère des sacs en plastique, ramasse des piles de vieux journaux déposées au pied d'une benne à ordures et les entasse dans un caddie de supermarché. Observant son manège et se le gardant pour plus tard. Une horde de voyous. Dressés pour la chasse. Surveillant, de loin, une voiture en stationnement. Nez vers l'avant. En position de fuite. Une Pontiac Catalina 65. Rouge. Cerise. Décapotable. A l'arrêt depuis près de cinq minutes déjà. Et dont, apparemment, aucun chrétien ne se prépare à descendre.
- Mate-moi donc ch'te putain d'charrette ! Une voiture de collec'ch'ion, ch'te dis ! La clach'e !
Guetteurs sonnant la vue du gibier. Guerriers gagnant leur poste de combat. Hiboux passant leur cagoule. Chasseurs enlevant la muselière des chiens d'attaque, les excitant et les préparant à l'assaut. Pirates hissant un soutien-gorge noir au sommet de l'antenne de leur trois-mâts de course. Bagnole d'assaut décollant du trottoir en douceur, s'avançant à pas feutrés, toutes lumières éteintes, sortant des sous-bois, prenant la mer, furtivement.
S'approchant, furtivement, s'approchant, s'approchant, ronronnant, s'approchant. Ecoutant, s'approchant, furtivement, ronronnant, écoutant, écoutant, écoutant, s'approchant. Braillements d'autoradio. Quintes de toux excessives. Eternuements artificiels. Démangeaisons simulées. Exercices de respiration forcés. Rires outranciers. Bruissements d'étoffes froissées. Petits cris effarouchés. Canettes de Four Roses & Cola ouvertes avec les dents. Capsules de bouteilles dévissées. Budweiser. King of Beers. Vitres embuées. Organes sexuels reniflés et tripotés. Halètements. Souffles courts. Pertes d'urine. Couinements des ressorts d'un vieux sommier. Affrontements armés à la frontière ivoiro-thaïlandaise. Clap de départ. Action.
Hors-bord des voyoux accélérant soudain. Vibrant et vrombissant. Pétarades agressives d'une tronçonneuse qui, brusquement, se met en marche. Et la meute qui commence à aboyer. Montre les crocs. Hurle des cris de guerre.
- Hayoo !
Grands phares allumés. Puissant projecteur mobile braqué sur la cible. Eblouissant et terrorisant un couple de
- Hayoo ! Hayooo !
vieux adolescents, face à face, bec à bec, peau à peau, poils à poils, sexe à sexe. Des gosses de bourges qui reviennent d'une virée dans les discothèques et les boîtes de nuit du quartier où les bridge-and-tunnels du Queens et de Brooklyn viennent danser sous ecstasy et se tirer des rails de coke. Un bel athlète, parfumé, les cheveux retenus en queue de cheval, un jeunard. Ayant qqquelques prrrobbblèmes ddd'élocccution mots mais ne souffrant apparemment d'aucun trouble d'érection. Bégaiement ? Défaut de prononciation ? Débit trop lent ou trop rapide ? Difficulté d'expression ? Difficulté à mettre sa pensée en mots ? Difficulté à éprouver des sentiments ? Ejaculation précoce ? Un jeunard et une aguichante poupée Barbie. Un peu barje. Complètement schlasse. En plastique. Qui se roulent des gommes au collagène, découvrent et explorent en profondeur leurs zones érotiques sur fond de bière, de bourbon ou de rye, opèrent un rapprochement physique anarchique sur la banquette arrière de leur voiture, s'entraînent à assurer leur descendance et à perpétuer leur race selon le rituel social en usage dans l'espèce à laquelle ils appartiennent.
- Hayoo ! Hayooo ! Hayoooo !
Le jeunard se rajuste en vitesse, n'a même pas le temps de reboutonner sa braguette, actionne le dispositif de sécurité qui commande le verrouillage automatique des portes, se jette derrière le volant.
- Mmmerde !
Démarre en trombe. Percute la cage des assaillants qui lui bloquait le passage. Tôles froissées. Pare-chocs tordus. Ailes enfoncées. Le jeunard recule, prend de l’élan, déboîte, parvient à se dégager, force le barrage, appuie sur la pédale de l'accélérateur. A donf. Met toute la sauce ! Pied au plancher ! Fonce ! Les voyous sortent précipitamment de leur bagnole, vociférent des injures, redressent vaille que vaille leur garde-boue défoncé, dégagent une roue coincée, hurlent de rage, se lancent à la poursuite du véhicule des fuyards dont les feux rouges viennent de disparaître au bout de l'avenue.
- Vite, vite, vite, on a encore une p’tite chanch'e de ch'le faire, ch'te client !
Double virage à angle droit. Embardée. Accrochage. Coup de volant. Perte de contrôle. La voiture du jeunard renversant une poubelle, manquant heurter les pompes d'une station service, cherchant à éviter une grue parquée à l'entrée d'un chantier, dérapant, tournoyant sur elle-même. Un looser qui s'apprête à traverser la rue, prend peur, trébuche, chute. Sa tête heurte violemment la bordure du trottoir.
- Oh mmmerde, le cccon !
Le jeunard reprenant le contrôle de son véhicule, donnant un violent coup de frein, s’arrêtant pile, faisant marche arrière pour revenir sur les lieux de l'accident. Passant sur le corps du clochard. Lui broyant les jambes, lui brisant les os du bassin, lui écrasant le thorax. Choc. Soubr resauts. Moteur rc calé. Les grands phares et le projecteur de la bagnole des poursuivants apparaissent subitement dans le rétroviseur.
- Meeeeerde !
Le jeunard redémarre aussitôt, se dégage, roule une nouvelle fois sur la carcasse du bonhomme. Lui casse la colonne vertébrale et lui explose le crâne. Provoque l'éclatement du péritoine.
- Mmmmeeerde !
Remet les gaz. Eperonne et chicote sa monture. Regagne de la vitesse. Voiture gr grog groggy, choq quée, hoq hoquetante d’émotion, brûlant tous les feux rouges, s'enfuyant, s'enfuyant, brinquebalante, titubante, haletante, cabossée, déglinguée, bosselée, tuméfiée. S'enfuyant, s'enfuyant, s'enfuyant, s'enfuyant. Rouée de coups. Pourchassée par la meute en furie. Le pare-chocs en compote. La pompe à eau claquée. L'alternateur brûlé. Le pot d'échappement crachant un f filet de f ff fff fumée noire. Course-poursuite. Crissement des pneus. Fonce ! Fonce ! Fonce ! S'enfuyant. Mais bientôt rattrapée.
- Hayoo ! Hayoooo !
Tamponnée par l'arrière. Poussée dans un fossé. Précipitée contre un réverbère.
- Yeaaaaaah ! Yeaaah !
Emboutissant une borne d'incendie. Accrochant une bordure de béton. Bousculant les cônes de sécurité placés autour d'un avaloir bouché. Percutant une camionnette à l'arrêt. Heurtant un arbre de plein fouet. Terminant sa course dans les bacs à fleurs municipaux. Klaxon bloqué. Moteur noyé. Odeurs d'essence et d'huile brûlée. Déploiement des airbags.
- Yeaaaaaaaah ! Yeaaaaaaaaaaaah !
Le jeunard forcé de s'arrêter. Sonné. Hébété. Nez écrasé. Entailles au front. Incapable de se ressaisir et de prendre la fuite à pied. Les assaillants montant à l'abordage. Grimpant sur le capot de la voiture. Défoncés. Déchaînés. Donnant des coups de masses dans le pare-brise pour le faire voler en éclats. Forçant les portières. Arrachant les clefs de contact. Le jeunard accroché par la cravate prénouée.
- On va t'apprendre le rech'pect !
Et qui fait mine de se défendre. Et qui joue à l'outragé.
- Dddo nnnot innnvade my bbbody ppprivacy !
Soulevé. Extirpé. Expulsé de son siège. Jeté hors de son véhicule. Sauvagement frappé. La nymphette en plastique, indemne, poussant des cris hystériques, appelant à l'aide.
- Oh, my God ! Au secours ! Au secours ! Au secours ! Appelez la poliiiiice !
Recevant deux claques dans la gueule. Aspergée de spray au poivre.
- Qu'elle ch'e calme, ch'te connach'e !
Le jeunard empoigné par le col de son veston de daim, agrippé par sa queue de cheval, ceinturé.
- Tu vas nous payer ch'a, beauté ! Tu vas morfler grave ! On va ch'alement t’décoiffer, mon biquet !
- Qu'essst-ccce … ? Qu'essst-ccce qqque qccc'essst ? Mmmeerde ! Qu'essst-ccce qcque vvvous mmme vvvoulez ?
- Enfoiré, enculé, connard, chauffard, putain d'ta mère ! Tu bouch'illes not'bagnole et tu t'imachine peut-être qu'tu vas t'en tirer comme ch'a, hein ? Ch'vais t'faire la teuf ! Ch'vais t'pach'er au train ! Ch'vais t’faire reluire, mon biquet ! A donf !
- Mmmeerde ! Mmmais jjje n’vvvous ai rrrien fffait, mmmoi ! C'essst vvvous qqqui … ! Je, je, jeee ...
Vacarme assourdissant. Autoradio fonctionnant à plein volume.
- Mmmmeeerde, qqquoi ! Je, je, jeee, …
Hurlements des sorcières électriques. Galop trépidant des trompettes de la cavalerie fédérale génocidaire s'abattant sur les villages indiens. Martèlement des sabots d'un troupeau de bisons migrateurs, chargeant dans le brouillard, dès l'aube, pesamment, dans les plaines de l'Oregon.
Le veston retroussé sur la tête. La chemise de soie bleu roi déchirée. Le t-shirt mis en pièces. La ceinture découpée au cutter. Le froc abaissé de force. Le falzar sur les chevilles. Le caleçon arraché.
100% coton. Une grosse tache de vin découverte sur l'entre-fesses.
- Hayoooooooo !
Epluché. Déplumé. Ecorché. Gueulante du jeunard. Essayant de se dégager. Vociférant. Se démenant. Se débattant. Coups de pied, ruades, morsures, jurons.
- Mmmmmeeeerde ! Lâchez-mmmoi, ssalopards ! Ssstop ! Arrrêtez ! Arrrêtez, qqquoi ! Vous nnn’savez pas qqqui jjje sssuis ! Vous n'sssavez pas pppour qqqui j'tttravaille !
- La ferme, mon biquet !
Plaqué sur le capot de sa voiture. Le ventre, la poitrine et la joue brûlés par la tôle de la carrosserie.
- Mmmmmmeeeeerde ! Vvvous mmm’pppaierez ça, fffumiers, ordures ! Je vvvous tttuerai ! J'vvvous fff'rai tttous bbbuter !
Le falzar sur les talons. Le caleçon enfoncé au plus profond de la gorge.
-Mmmm !
Le trou de balle lubrifié à l'huile de moteur.
- Mmmmmmm ! Mmmmm !
- La ferme, on t'a dit, mon biquet !
Le lacet de cuir noué autour des couilles.
- Je serre ? Je serre ? s'excite l'étrangleur, un rouquin boutonneux.
- Mmm ! Mm !
La teenie aux longs cheveux roux, les yeux écarquillés, se réveillant soudain, sortant de sa stupeur et de ses larmes, se précipitant au secours de son décapsuleur, se jetant sur les mecs, essayant de s'interposer.
- Oh, my God ! Non ! Noon ! Nooooon ! Au secours ! Arrêtez ! Au secours ! Lâchez-le ! Lâchez-moi ! Lâchez-nous ! Poliiiiiiice !
Mal lui en prend. Couteau et scalpel sur la gorge. Coup de tête. Balayage.
- De quoi tu t’mêles, frotteuch'e de parquets, ch't'une affaire de mecs ! T'as qu'à attendre ton tour ! Tu y pach'eras auch'i ! Ch'ûr ! On t'oublie pas ! On s'garde tes p'tites fèch'es pour le déch'ert !
- Oh, my God ! Lâchez-le ! Lâchez-moi ! Au secouuurs !
- Ch'te pointe, connach'e ? Ch'te bute ? Ch'te dèch'ends ? Ch't'ec'ch'ploch'e la gueugueule ? Ch'te fais ch'auter le caich'on ? Ch'te pach'e la ch'ervelle au mic'ch'er ? Ch'te fous une laich'e autour du cou et ch't'attach'e à un piquet ? Ch'te ligote à un cactus ou à un acach'ia ? Ch'te ch'uch'pends par les pieds à un réverbère ? Ch'te brûle le visage avec un briquet ? Ch'te coule d'la bougie à la ch'ire d'abeilles dans les oreilles ? Ch'te fous la tête dans un ch'ac en plach'tique bleu avec une ch'ouris chauve et une tarentule recouverte de poils urticants ? Ch'te badich'eonne le nez, lèch'yeux et la bouche avec de la pâte de piment rouch'e ? Ch'te recouds les paupières avec du fil de canne à pêche ? Ch't'entaille les tendons du pied droit ? Ch'te broie les rotules ? Ch'te ch'ec'ch'ionne un doigt de la main gauche avec lequel tu t'touches ? L'index ou le mach'eur, à ton choix !
- Oh, my God ! Lâchez-le, quoi ! Mais lâchez-moi ! Lâchez-nous ! Au secouuurs ! Poliiiiice !
- Ch'te tranche les tétines avec une lame de rach'oir rouillée ? Ch'te découpe les nichons en rondelles de ch'aucich'on à l'ail ? Ch't'épile la moumoute ? Ch'te rach'e le pubis à la tondeuch'e à gach'on ? Ch'te couvre le con de plumes et de goudron ? Ch't'ec'ch'ich'e la langue et le clitoris' ? Ch'te bourre les orifich'es de mangues vertes au gros ch'el et au pili-pili ? Ch'te farch'is l'croupion de noyaux de pêche ou d'abricot ? Ch't'enfonch'e un rouleau de papier cul dans la gorch'e ? Ou un déboucheur de gogues dans l’vach'in ? Ou mon trouch'eau de clefs ? Ch'est tout ch'que tu cherches, connach'e ?
La bimbogirl, terrorisée, la chevelure défaite. Fermant les yeux très fort pour ne plus rien entendre. Cessant de solliciter l'aide de la police. Cessant d'appeler au secours.
- Oh, my God ! Je vous supplie de le lâcher ! Lâchez-le ! Ayez pitié !
- Ch'te troue le bide avec un tournevis ? De bas en haut ? En touillant ? Ch'te ch'ors les yeux des orbites avec une cuiller à café ? Ch'te repach'e les fèch'es avec un fer électrique ? Ch't'enfonch'e une balle de ping-pong dans la bouche et ch'y mets l'feu ? Ch't'enduis de ch'ire à bois, ch't'asperge de white-ch'pirit, ch't'emballe dans une couverture imbibée d'éch'ench'e et ch't'allume au chalumeau ? Ch'est ch'que tu veux, connach'e ?
- Oh, my God ! Lâchez-le ! Lâchez-moi ! Lâchez-nous ! Ayez pitié ! Pitié ! Pitié ! Pitié !
- Ch'uch'e ton pouch'e, ch'a t'empêchera d'chialer !
Deux larbins retenant le jeunard par les bras et les jambes. Muselé. Ecartelé. Crucifié. Le chef de meute enlevant sa cagoule, tripotant compulsivement son piercing à l'oreille, ouvrant sa putain de braguette, défouraillant, enfilant une capote, mettant des gants pour ne pas laisser d'empreintes sur les fesses et le capot de la voiture du client, pointant son dard.
- Ch'vais t'faire pach'er tes envies de troncher des poupées en plastique dans des bagnoles de luc'ch'e, mon biquet !
Poussant, poussant, poussant. Introduisant son goulot dans la fente à monnaie. Pétant l'oignon du beau gars. Brisant le cylindre de la serrure. Forçant la porte du vestibule. Souquant, souquant, souquant. S'enfonçant profondément dans le cloaque. Grimpant rapidement deux ou trois étages en courant. Agrippant le flipper. Secouant, secouant, secouant.
- 200 battements par minute, mon biquet !
Poussant le manche vers la gauche, puis vers la droite, pédalant, pédalant, pédalant, connaissant un passage à vide, s'emmêlant dans ses braquets, négociant maladroitement un virage, patinant sur un tapis de feuilles mortes, ratant son tournant, pataugeant, pataugeant, pataugeant, manquant effectuer une sortie de route, fourrageant, fourgonnant, farfouillant, se reprenant aussitôt, pédalant, pédalant, pédalant, attaquant au pied de la côte, poussant le stick vers l'avant afin d'accélérer, plaçant un démarrage, montant au filet, forçant la décision, lâchant son cri, balançant la purée, déchargeant sa kalachnikov. Enculé. Endoffé. Encaldossé.
- Peanut's butter, mon biquet !
Et les deux autres là-bas, les jumeaux branleurs, Adam et Richard Abbott, attendant leur tour, ouvrant les sabords, hissant les couleurs, brandissant leur organe, remuant, agitant, cherchant l'inspiration, se touillant les salades, se tripatouillant le lézard, se gonflant la minerve, se stimulant l'un l'autre de la main et de la voix, brassant, brassant, brassant et
- Up 2 U !
courant le long des quais, s'agrippant aux mains courantes, sautant dans le train en marche.
- Five, four, three, two, go !
Emmanché. Empaffé. Enviandé. Aboiements de pitbulls ou de rottweilers. Klaxon bloqué. Insultes. Cris. Baves. Sueurs. Grincement des gonds rouillés. Cris des serrures. Sanglots furieux. Autoradio continuant de beugler. Enfoiré. Capot de la voiture maculé de sang, de larmes, de bave, de foutre et d'excréments humains. Tringleur farci. Fourré. Bourré. Elargi. Irrigué. Empalé jusqu'au duodénum. Fertilisé. La bimbogirl, paralysée par la terreur, tombant à genoux, retrouvant un filet de voix, implorant, larmoyant, pleurnichant.
- Oh, my God ! Lâchez-le, s'il vous plaît ! J’vous en prie ! Ayez pitié ! Laissez-nous, j’vous en conjure !
- La ferme, pich'euch'e !
- Oh, my God ! On ne dira rien à personne, j’vous le promets, j’vous le jure ! On n’ira pas chez les flics ! On dira qu'on a été attaqués par d'autres types ! Une autre bande ! Des Jaunes, des Blacks ou des Portoricains ! Des Juifs ou des Arabes, quoi ! Ou des Native Americans ! Ou des Cubains ! Ou des Aliens ! Ou des Irakiens ! Comme vous voudrez ! Tout ce que vous voudrez ! On dira qu'c'est des étrangers qui nous ont attaqués ! Et qu'vous êtes venus à not’secours ! Et qu'on les a vus s'enfuir ! Et qu'ils avaient des sales têtes de rats communistes ! On dira qu’c'est vous qui nous avez sauvé la vie ! S'il vous plaît !
- Arrête de chialer, connach'e, chieuch'e, mouilleuch'e de p'tites culottes, dech'ippeuch'e de braguettes, ach'tiqueuch'e de pénis !
- Oh, my God ! Oh, my God ! On dira qu’ce n'était même pas vous ! J’vous en prie ! J’vous en supplie ! On dira qu'on n’vous connaît même pas ! Et qu'on n'vous a jamais vus !
- Arrête de chialer, on t'a dit, connach'e, ch'uch'euch'e de jus de pipes, enfourneuch'e de couilles molles !
- J’vous en conjure !
- Ch'a ch'uffit comme ch'a, ch'ireuch'e de glands !
- Au nom du Seigneur...
- T'es vraiment trop chiante, on ch'e pach'era de déch'ert, tant pis pour tes fèch'es !
Molosse au poil ras lâchés sur la bête. Plantant leurs crocs d'acier dans les fesses en plastique de la lolita.
- Ooh !
Lui déchiquetant les parties charnues et lui arrachant les implants.
- My Godd !
Gueule en plastique ouverte à coups de pied. Visage en plastique griffé au cutter. Mèche de cheveux arrachée. Arcade sourcilière pétée. Oeil gauche tuméfié. Lèvres tordues. Epaule démise. Clavicule fracturée. Deux incisives cassées. Ventre en plastique et plante des pieds tailladés au rasoir. Cigarette écrasée dans l'oreille. Crochet du droit entre les seins en plastique.
- Oooh, my Goddddd !
Menottée. Ligotée. Bâillonnée. Jetée dans le coffre de la voiture.
- Et cric et crac ! Ch'a t'apprendra à nous cach'er l'ambianch'e, ponch'euch'e de bites, à nous gâcher not'putain d'teuf, foutue connach'e ! Pour une fois qu'on avait l'occach'ion de ch'e taper un beau biquet ! Et qu'on y prenait vraiment plaich'ir !
On arrache la montre et la bague du jeunard. Couché par terre. Ne bougeant plus. Faisant semblant d'être évanoui. On emporte l'autoradio, le téléphone mobile, la plaque d'immatriculation. On fouille. On fait main basse sur un jeu de cartes de crédit et un agenda électronique planqués dans la boîte à gants. On fouille, on fouille. On embarque un briquet et quelques barres de chewing-gum. On fouille, on fouille, on fouille. On découvre. Un bracelet et un collier que la sucette-pétasse avait eu le réflexe de cacher dans un vide-poches ou dans un cendrier. Juste avant l'assaut. Sans se faire repérer.
- Futée, ch'te pimbêche en plastoche ! Pas ch'i barch'e que ch'a !
On fouille encore. On découvre. Sept sachets de cinquante grammes de cocaïne entre la banquette arrière et le coffre de la bagnole.
- Ch'hit !
Et dix-huit pacsons d'héroïne dans le lave-glaces.
- Fuck ! Fuck ! Le biquet est un r’vendeur de dope ! Fuck ! Fuck ! Fuck ! Le biquet est un r’vendeur ou un mulet ! Fuck ! Fuck ! Fuck ! Fuck !
Portières griffées au couteau. Rageusement. Pare-brise arrière et vitres latérales explosées à la barre de fer. Fauteuils poignardés au tournevis. Pneus crevés. Rétroviseur arraché.
- On trach'e, les mecs ! Vite ! On ch'tire avant qu'on ch'fach'e repérer ou qu’les putains de flics ne rappliquent ! On calte, on pich'te !
Coussins de cuir beige lacérés. Extincteur vidé dans l'habitacle. On n'oublie pas d'embarquer le démonte-pneu, caché sous le siège du conducteur.
- Pour faire du bizz, on n’ch'ait ch'amais ! Et ch'a pourra touch'ours ch'ervir, on n’ch'ait ch'amais !
Un bien joli jeune homme. Tremblant. Prostré. A quatre pattes sur le trottoir. Enlevant le caleçon qu'on lui avait fourré dans la bouche pour l'empêcher de gueuler.
- Mmmeerde !
Effondré. Courbatu. Humilié. Eprouvant des difficultés à se relever, à se tenir debout et à faire quelques pas. Cheveux en désordre, défaits, collés par la sueur. Peinant à retrouver son souffle. Ramassant ses fringues. Souillées. Déchirées. Eparpillées. Se bouchonnant les fesses et les cuisses avec une pochette de soie verte, pailletée d'argent, parsemée de petites pâquerettes blanches. Retenant son pantalon à la main. Tentant de renouer sa queue de cheval. Rage. Douleur. Désespoir. Essuyant des larmes. Vomissant de la bile. Régurgitant une potée jaunâtre. Lâchant ses dernières selles. Dégorgeant de toutes parts. Cherchant à retrouver le réflexe qui lui permettrait de contracter à nouveau ses sphincters. N'arrivant même plus à ouvrir le coffre de la bagnole.
- Mmmmmmmeeeeeerde, j’vvvous r'trouverai, les mmmecs !
Le coeur lui martelant la poitrine.
- J’vvvous r'trouverai ! Tôt ou tttard ! J'vvvous fff'rai exploser la gggueule ! Tôt ou tttard ! J'vvvous fff'rai tttous bbbuter !
Cinq préservatifs gisant sur le sol. Nombre d'auteurs ? Nombre de coups tirés ?
- J'vvvous aurai, les mmmecs ! J'finirai bbbien par vous avoir ! Vous êtes dddéjà mmmorts !

Totalité de la scène discrètement filmée, dans l'obscurité, par Andy Myers, un chasseur d'images qui passe son temps derrière la fenêtre de sa cuisine, épiant les faits et les gestes des promeneurs et des glandeurs, observant les allées et les venues des dealers et des filles, surveillant les déplacements des limousines, des ambulances et des voitures de police, mâchonnant du chewing-gum à la nicotine, prenant des notes sur de petites fiches blanches ou quadrillées, pressant le déclencheur de son appareil, enregistrant sur cassettes les événements du quartier. Par curiosité. Pour ses archives personnelles. Pour alimenter ses fantasmes et entretenir ses névroses.
Pour écrire un vrai roman. Noir. A l'ancienne. Avec des agressions, des meurtres, des coups de matraque et des cassages de gueule, des poubelles renversées sur les trottoirs, des trafics de drogue, des viols et des kidnappings, des hamburgers et du ketchup, des nichons arrosés au champagne, des baskets sans lacets, des jazzeurs et des rockeurs, des flics et des putains. Et pour revendre les copies de ses cassettes à tout chrétien intéressé qui remettra une offre raisonnable.



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Quelques liens permettant de retrouver, dans le roman lui-même, différents personnages qui (malgré les étronçonnages et autres ravalements de façade entrepris en vue de rendre le bouquin "politiquement, économiquement, socialement et culturellement" plus correct) restent intéressants...

1. Little Mary


Cliquez sur:

http://jodi-book.over-blog.com/article-jodi-toute-la-nuit-chapitre-deux-2-3-a-2-5-54150041.html

et sur:

http://jodi-book.over-blog.com/article-jodi-toute-la-nuit-chapitre-quatre-de-4-2-a-4-5-54183379.html

et sur:

http://jodi-book.over-blog.com/article-jodi-toute-la-nuit---chapitre-six-54183782.html

et sur:

http://jodi-book.over-blog.com/article-jodi-toute-la-nuit-chapitre-six-6-1-deuxiemepartie-et-6-2-54183829.html


2. Vieux Jésus


Cliquez sur:

http://jodi-book.over-blog.com/article-jodi-toute-la-nuit-chapitre-quatre-de-4-2-a-4-5-54183379.html
ou sur:
http://jodi-book.over-blog.com/article-jodi-toute-la-nuit-chapitre-sept-54183988.html

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